Béa Johnson raconte de façon assez amusante comment elle est passée de l'ultra-consommation au zéro déchet : d'une vie d'américaine botoxée à une vie qu'elle décrit comme plus riche et libérée. Comme parfois dans le changement, on passe souvent par des postures un peu extrêmes avant de trouver le juste compromis : vous comprendrez de quoi je parle quand vous lirez l'épisode follement drôle des grains de kéfir. Après pas mal de tâtonnements, elle a trouvé l'équilibre dans sa démarche et réussi à développer une façon de vivre et de consommer pour elle et sa famille, qui, sans les priver de rien d'essentiel, leur permet de ne générer qu'un litre de déchets par an qui ne soient ni compostables, ni recyclables.
Au delà de l'impact environnemental évident (1 poubelle de 240l/semaine auparavant contre un bocal d'un litre par an aujourd'hui!), Béa Johnson explique qu'elle a diminué son budget de 40% (elle consomme mieux mais moins), qu'elle a désormais beaucoup plus de temps disponible (sa maison est rangée en un clin d’œil, elle n'a plus besoin de s’acquitter de tâches désormais inutiles comme sortir les poubelles, etc...), et a des bienfaits sur la santé (alimentation bio, moins de plastique, moins de produits neufs dégageant des émanations toxiques, meilleurs produits cosmétiques, etc...).
Elle expose sa méthode de façon simple : refuser, réduire, réutiliser, recycler, composter. L'ordre même de ces 5 étapes est essentiel. En quelques mots, voici ce qui se cache derrière chacune de ces injonctions :
1- refuser
Il s'agit de refuser que trop de choses ne rentrent dans la maison : ce qui n'est pas consommé n'aura pas besoin d'être jeté ou recyclé. Par exemple, cet échantillon de shampooing que vous prenez dans votre chambre d'hôtel :
- le simple fait de la prendre déclenche son remplacement le lendemain, donc sa refabrication.
- vous allez l'utiliser (dans le meilleur des cas !)
- vous allez ensuite le jeter, ce qui prend du temps (le mettre dans la poubelle, fermer la poubelle, descendre la poubelle dans le bac, sortir le bac pour le ramassage).
- il sera recyclé si vous l'avez bien trié. Il faudra utiliser de l'énergie pour le transporter sur son lieu de traitement, pour le transformer en un nouveau produit et pour l'acheminer sur son nouveau lieu de vie/de vente.
Je vous vois ricaner d'ici ! Vous vous dites : "Quel foin pour un petit shampooing!". Pas faux, mais c'est vrai aussi pour les stylos (combien d'années seront-elles nécessaires pour que vous épuisiez votre stock de stylos??), les prospectus (qui vont pour la plupart directement de la boîte aux lettres au bac de recyclage, non?), les cartes de visite que l'on nous donne au travail (jetées dès qu'on a enregistré le contact dans notre téléphone), les magazines (qu'on garde pour y prendre des idées plus tard, mais qui prennent la poussière sans jamais être rouverts), le kit "bienvenue Bébé" de la maternité, les échantillons de la parfumerie, et bien d'autres encore. Je ne sais pas pour vous, mais moi, je finis toujours par les jeter après les avoir gardés "au cas où" dans mes tiroirs pendant des mois et j'en remplis des sacs. Honnêtement, si c'est pour finir comme ça....
Autre exemple : tous les produits en plastique à usage unique. Le marketing est bien fait qui vous a fait acheter sans réfléchir ces gobelets en plastique jetables et ces assiettes plastifiées pour la douzaine de petits copains invités à l'anniversaire du grand : tellement plus simple de tout mettre à la poubelle à la fin du goûter ! Pourtant, mettre 12 verres et 12 assiettes dans le lave-vaisselle, ça n'aurait pas été compliqué non plus...
Une fois le camion poubelle passé, on oublie nos poubelles , où elles vont, ce qu'elles deviennent. C'est dommage, car elles ne disparaissent pas comme par magie.
2- réduire
Il s'agit là de se poser la question de l'utilité de tout ce que l'on a chez soi. Chez moi, j'ai des tas de choses dans les placards que je n'ai pas utilisées depuis... des années! Des chaussures, des vêtements, des appareils de cuisine, de la vaisselle... J'ai même des produits périmés de longue date dans mes placards de cuisine ou de salle de bain !
Il convient de faire des choix pour chaque chose : garder, donner, revendre, réparer, recycler, parfois jeter. Il s'agit aussi de se poser les bonnes questions avant de racheter de nouvelles choses : en ai-je vraiment besoin? Puis-je acheter en vrac pour éviter d'avoir à gérer un nouvel emballage ? Enfin, il est judicieux d'éviter les activités qui encouragent la consommation : télévision et magazines sont très prescripteurs de nouveaux besoins, et le lèche-vitrine bien sûr, beaucoup plus tentateur qu'une balade en forêt !
3- réutiliser
Il s'agit de privilégier les produits réutilisables : piles rechargeables, cabas solides pour les courses, gourde plutôt que bouteille d'eau, mouchoirs en tissu plutôt qu'en papier, torchons plutôt que lingettes, serviettes en tissu plutôt qu'en papier, etc...
Il s'agit aussi d'acheter des articles de qualité, qui peuvent être réparés si besoin. On peut aussi changer la destination d'un objet pour lui offrir une deuxième vie : ma tasse en porcelaine fendue est devenue mon pot à crayons préféré.
4- recycler
On ne recycle que ce que l'on n'a pas pu ni refuser, ni réduire, ni réutiliser.
Le recyclage est bien sûr plus vertueux que la poubelle, mais pourtant il nécessite de l'énergie et comporte sa part de pertes également.
5- composter
Il s'agit tout simplement de recycler les matières organiques comme les épluchures par exemple. Même sans jardin, c'est possible et ce n'est pas dégoûtant. Béa Johnson explique très bien comment s'y prendre.
photo © Béa Johnson |
Une fois sa méthode expliquée, Béa Johnson explore dans le détail tous les domaines de la vie privée où elle a mis en place son nouveau mode de vie : les courses, le ménage, la cuisine, la salle de bain, la chambre, la garde-robe, le bureau, le courrier, les enfants, l'école, les fêtes, les cadeaux, les sorties. Elle explique même qu'elle a mis aussi son chien au diapason du Zéro Déchet!
J'ai été très agréablement surprise par la pertinence de son livre. Je craignais une bible de litanies comme on en trouve à longueur de magazines (féminins) du style "achetez les cadeaux de Noël avant la Toussaint, baissez la température d'un degré, prenez des douches plutôt que des bains, collectionnez les coupons de réduction et les cartes de fidélité, ou diminuez la dose de lessive par deux en achetant des balles de lavage". Au lieu de cela, des recettes éprouvées et faciles à vivre pour utiliser des produits d'entretien et des produits de beauté peu nombreux, naturels, et peu onéreux, des conseils pour aller vers une garde-robe plus efficace, peu encombrante et au coût très limité.
Pour le moment, j'ai du mal à m'imaginer arriver à un litre de déchets par an et je n'ai pas trop envie de cet intérieur dépouillé à l'extrême qui est devenu la marque de fabrique de Béa Johnson. Néanmoins, jour après jour, j'amorce un cheminement inverse à celui du toujours plus qui a été le mien jusque là. Je pense que nous allons aller tout doucement vers plus de liberté, moins d'aliénation matérielle, plus de "vivre" et moins d'"avoir".
Je vous recommande vivement la lecture de ce petit livre de poche et du blog de Béa Johnson : Zero Waste Home ! Je vous tiendrai au courant des évolutions de nos habitudes vers le
Béa Johnson chez elle, avec son bocal de déchets annuels. photo © Sébastien Micke, parue dans Paris Match le 29/03/2013. |
Merci pour ton avis : cela faisait longtemps que je me demandais ce que valait ce livre!
RépondreSupprimerCe livre est marquant dans le sens où il initie une vraie prise de conscience. Peut-être que tu n'adopteras pas les stratégies qu'elle propose, maie je pense que tu ne verras plus jamais ta manière de consommer de la même façon. Et puis cette fille a un côté sympa, pas donneuse de leçon, qui est vraiment rafraichissant!
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